ô monde qui brûle

des soirées qui s'enchaînent toutes similaires 
des soirées où rien ne change 
où je bafouille en me grattant le crâne

des soirées où la mort n'est qu'une contrariété passagère 
ô monde qui brûle 
ô idéal mort 

des soirées où un opérateur en station de lavage se lance des défis absurdes en lien avec son  super-héros préféré 

des soirées où un apprenti technicien réseau se fout à poil à la première occasion 

des soirées où un employé rayon plantes raconte comment il a renoncé à sa carrière de rappeur 

des soirées où un poseur de gouttières abuse de substances 

des soirées où un pilote de ligne de production vomit en riant
ô monde qui brûle 
ô idéal mort 

des soirées où à force d'être en avance on finit à la bourre 

des soirées où les chevaux envahissent la voie ferrée 

des soirées où je fume de fausses 
cigarettes achetées dans une des deux épiceries de nuit de la ville 

des soirées où elle est d'une telle beauté qu'elle me largue
(maldita sea) 

y a des soirées qui ressemblent rétrospectivement à des jours de chance
ô monde qui brûle 
ô idéal mort 

des soirées sale réflexe 
où j'ai si peur de mes limites et de mes faiblesses que je te pourris la vie 

des soirées où celles et ceux qui me regardent
je ne sais pas s'ils sont fascinés ou révulsés
(coucou toi) 

des soirées où les plus forts triomphent de l'intelligence par la violence
persuadés qu'ils sont que 
le pays fonctionne mieux comme ça 
ô monde qui brûle 
ô idéal mort

des soirées où un écrivain estime que visiblement j'écris pour satisfaire mon ego 
que ma poésie n'est que gadgets et combines 
que ma poésie doit sûrement plaire à des gens qui n'en lisent pas 

des soirées où mes draps sentent la charcuterie malade 
des soirées où je m'en sors pitoyablement
où je gaspille l'air que je respire 
clone défaillant de moi-même 

des soirées qui ne rendent pas la monnaie
des soirées où le double langage des adultes est d'une triste banalité 
des soirées où des hommes jeunes boivent des sodas et mangent des bonbons en se matant des vidéos de gonzesses en bikini qui testent des flingues
ô monde qui brûle 
ô idéal mort

des soirées où les pressentiments sont partout
particules d'odeurs qui collent 
je marche sur mes lunettes de vue 
une des branches est tordue que je redresse tant bien que mal 
ça a l'air de tenir  

des soirées qui ne sont pas réelles mais qui font grave du bien 

des soirées où il n'y a pas de bonne réponse

des soirées où j'apprends de mes erreurs 

des soirées où il est huit heures du matin à Paris et où je m'octroie un petit whisky en terrasse à m'abstraire dans le ciel qui nage

soirée mythomanie toxique 
soirée conflit divertissant 
soirée chez les zarbis où la norme prend trop de place

des soirées où je ne sais pas si je suis heureux
des soirées où je me sens si paisible que je m'en tape d'être heureux
ô monde qui brûle 
ô idéal mort

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